Création de la 2e DB – 24 août 1943

 

 


TEMARA – MAROC

 

 

 


TEMARA – MAROC

 

 

 

Extrait de : “LECLERC de HAUTECLOCQUE”
François INGOLD et Louis MOUILLESEAUX
Editions Littéraires de France- 1948

 

 

PEU après leur arrivée en Tunisie, le Commandement français en Afrique du Nord décide de refouler en Tripolitaine les Forces Françaises Libres.
En exécution de cet ordre, la Force L se dirige sur Sabratha — ancienne ville romaine de Tripolitaine.
Par ordre du général de Gaulle, elle devient 2e Division Française Libre. La transformation implique une refonte complète, des étoffements considérables et une mise à l’instruction prolongée. Travail immense, car il s’agit de devenir Division blindée.

Trois ans de faits d’armes sahariens justifient-ils « la sanction de Sabratha » ? Leclerc m’écrit au Tchad son amertume, ce fut son temps le plus dur. Puis vint l’apaise-ment, l’exil au désert féconde les caractères et épure les âmes. « En rentrant l’autre jour, écrit-il à son frère, j’ai encore vu pas mal de gens. Très bien reçu partout, convaincu qu’il s’en faut de peu pour que ces divisions stupides prennent fin. A Alger j’ai vivement appuyé dans le sens unification de l’Armée, et j’ai réussi… »
Son frère est à l’État-Major de Rabat, il en a des nouvelles depuis le temps dû Djebel Garci, mais les mois se sont passés sans aucune possibilité de rencontre. « Suivant les principes reçus jadis, j’ai envoyé mes types en perm et je reste au turbin. C’est le seul moyen de commander. J’ai bien passé trente-six heures à Alger entre deux avions, mais je n’ai pu te faire signe. Je te promets que d’ici un mois nous nous serons vus et embrassés. »
Quelque temps après, Leclerc devait effectivement lui rendre visite à Rabat. Il était heureux. Les deux frères firent à travers la ville une promenade en charrette anglaise. « On ne le remarqua pas, les Généraux étaient nombreux à cette époque en Afrique du Nord. » Je me souviens de l’ironique répartie d’un Français libre : « II y a, paraît-il, deux cents Généraux en Afrique du Nord, avec nous il n’y en a que trois : Larminat, Koeniget Leclerc. »

La quarantaine de Sabratha-s’achève en août 1943; il est enfin décidé d’inter-rompre l’exil des Free-French, en les ramenant dans les territoires de notre Empire.
Les gourbis, tranchées dans le sable recouvertes de tôles et de palmes, sont quittés sans regret. Cap ouest vers le Maroc. Deux mille cinq cents kilomètres d’étapes et la Division s’installe à Témara, au sud de Rabat, où elle doit terminer sa mise sur pied.
Témara devient ainsi le cœur de la 2e D.B. Leclerc a choisi sa région, malgré l’inquiétude de certains formalistes qui la trouvaient défavorable au point de vue sanitaire. Il la connaît bien. La mer est proche et Rabat assez loin pour éviter les ennuis d’une grande ville. Il garde de Témara le souvenir de son profil longtemps entrevu quand on vient de Rabat, le grand minaret, les larges murs de pisé d’où s’échappe la floraison très verte de vieux arbres, et vers la mer les longues croupes où abondent les cailles au moment des passages.

On aura une idée de l’ampleur de la tâche nouvelle dévolue au général Leclerc en étudiant le tableau de composition de la Grande Unité motorisée qu’il a pour mission de mettre sur pied. Son encadrement exige plus de spécialistes que le Régiment du Tchad ne comptait en 1940 de Tirailleurs Saras…
Avec ses véhicules de combat, ses Jeep de commandement, ses camions G.M.C, de transport et ses véhicules spéciaux, la 2e D.B. compte près de 3.000 véhicules représentant sur route en ordre de marche une longueur de colonne de plus de 300 kilomètres. Ses effectifs atteignent 16.000 hommes environ.
Quel changement depuis le Tchad. Les « charrettes à savon » du désert ou de la Tunisie sont devenues Half-Track, Destroyer, Sherman. Combien vétusté paraîtrait la colonne de Koufra croisée par la 2e D.B. Plus d’armement disparate pris à l’ennemi et réparti en butin – – parfois non sans drame – – au soir des combats, mais l’armement le plus moderne et la plus puissante unité aux ordres du plus jeune divisionnaire de l’Armée.

Mais dans l’âme rien ne changera. L’esprit du Tchad deviendra l’esprit de la 2e D.B. dont les chars porteront les noms des victoires du Fezzan ou de la Tunisie ; « Mourzouk », « Koufra », « Ksar-Khilane »… Mais, si le matériel est « Standard », le problème des effectifs se complique d’une donnée psychologique. Certes, le personnel ne manque pas, mais il s’agit de fondre dans la même unité les anciens du Tchad et les nouveaux venus. Leclerc réalisera la fusion des esprits et, précurseur du Général de Lattre qui, plus tard, devait à son tour l’entre-prendre et le réussir à une échelle plus vaste, il fera « l’amalgame ». « La 2e D.B. est la première grande unité dans laquelle se trouvent réunis des Français qui, depuis trois ans, étaient séparés par les circonstances. Je vous demande de réfléchir à l’importance de cette réunion. Notre pays ne peut plus se payer le luxe de divisions intestines. L’union est plus nécessaire que jamais pour rendre à la France sa grandeur nationale », écrit-il et bientôt, le travail en commun, la camaraderie, la parenté des tempéraments de barou-deurs, car les nouveaux venus sont des volontaires pour la plupart – – les uns d’Afrique du Nord, les autres évadés de France qui ont connu les prisons d’Espagne : tous, comme ceux du Tchad, sont animés par un ardent désir de combattre, — tous ces facteurs joueront dans le sens d’une cristallisation : Synthèse d’éléments de tout premier ordre.
Comme autrefois l’a fait Carnot, et comme plus tard le fera de Lattre, Leclerc poursuit une amélioration de la valeur militaire de l’ensemble en prenant comme base les unités parvenues au niveau le plus élevé, un nivellement sur le haut. Ainsi verrons-nous souvent à la tête des groupements de la 2e D.B. les grands anciens du Tchad : Dio, Massu, Guillebon et tant d’autres…
Le Général, d’ailleurs, fait sa politique personnelle de L’amalgame… le travail de la journée terminé, chaque soir, il invite chez lui des officiers d’unités différentes. Les réu-nions sont intimes et Leclerc se montre aimable et gai. Il apprend à connaître ses offi-ciers. Entre eux et lui se nouent des liens qui les associent à une tâche commune, la volonté de réussir devient collective et « l’amalgame » se réalise dans le travail quo-tidien de création de l’outil.

Mais le matériel n’arrive pas. Leclerc s’impatiente. Souvent il se rend à Casablanca et bientôt y détache des observateurs chargés de surveiller l’arrivée des bateaux américains et de le renseigner sur leur chargement. C’est ainsi qu’un jour, un coup de téléphone discret l’avertit de la présence dans le port d’un navire chargé de Sherman, Half-Track, etc…
Leclerc se précipite, offre au commandant américain six cents hommes pour décharger sa cargaison, la met à terre effectivement et entre ainsi en possession d’un matériel destiné à une division sœur : Esprit cavalier teinté de légionnaire, disons esprit du Tchad. Mépris du formalisme aussi :
« Plus que partout ailleurs les résultats seront nuls si les différents échelons ne commandent que par le papier ou attendent pour agir de recevoir un ordre ou un papier. Je demande à tous de résoudre les difficultés quotidiennes dans le cadre et dans l’esprit de la mission reçue, de provoquer les ordres nécessaires en signalant à l’autorité supérieure les erreurs ou les omissions ». Un des traits marquants de son caractère. C’est en évoquant cette époque que le général Koenig écrit : « II reçut un matériel solide, flambant neuf, luxe auquel il n’était pas habitué. Du coup il devint odieusement exigeant : il lui manquait toujours quelque chose ; le matériel n’était jamais aussi beau qu’il aurait voulu ; les cadres et les hommes n’arrivaient jamais aussi nombreux qu’il le désirait. L’ensemble devint magnifique : ce fut la fameuse 2e D.B. »

Les jours de manœuvres, quand les véhicules se déploient dans la campagne, Leclerc ressent une joie étrange. « Les mêmes moyens qui nous ont vaincus peuvent un jour faire venir la victoire. » Devant toute cette puissance maintenant à ses ordres, il en évoque une autre, celle de l’ennemi en 1940. La revanche est en vue et, plus le temps de l’action approche, plus grandit son désir d’agir.

 

 

 

 

 

 


DIO et ses 3 chefs de Bataillon
TEMARA – MAROC – 1943

 

 

Formation de la 2e DB au Maroc (juillet 1943-avril 1944)

 
 

Le 24 août 1943, sous l’impulsion du général Leclerc, le général de Gaulle et le « Comité français de libération nationale d’Alger » créent la 2ème division blindée, selon le modèle des divisions américaines, dans le cadre de la réorganisation de l’armée d’Afrique. « La constitution de la 2′ division blindée fut ma plus belle victoire » dira plus tard Leclerc.

Elle compte 16000 hommes entièrement équipés par les États-Unis et 4 000 véhicules américains, dont les chars Sherman.

Elle quitte ainsi l’appellation « 2′ division française libre » donnée par le général Giraud après la libération de Tunis.

Elle rassemble des soldats d’origines diverses : des marsouins du Tchad, des spahis d’Egypte, des compagnies de chars reconstituées en Angleterre, des régiments entiers d’Afrique du Nord et une unité de fusiliers marins.

Des volontaires venus du monde entier rejoignent aussi la 2e DB pour se battre : jeunes gens et cadres de métropole, réchappes des prisons espagnoles; corps-francs d’Afrique ; jeunes femmes arrivant des États-Unis avec leurs ambulances, …

Tous ces éléments ont donc été rassemblés au cours du mois de septembre 1943 dans la forêt de Temara près de Rabat.

Le reste de la préparation est effectué à Dalton Hall, dans la campagne anglaise du Yorkshire, en vue de la grande opération « Overlord »,
le débarquement en Normandie.

 

 

 

 

Leclerc va profiter de ce séjour forcé au camp de Sabratha pour réorganiser sa division et surtout l’étoffer avec de nouvelles unités, prélevées sur l’armée d’Afrique ou constituées par de jeunes évadés de France, arrivés par l’Espagne.

Malgré tous ses efforts, ses effectifs demeurent modestes (moins de 4.000 hommes, alors qu’une division classique en compte quatre fois plus !), mais cette insuffisance numérique est compensée par le prestige dont jouissent “l’armée Leclerc” et son chef depuis l’affaire de Koufra.

Le 13 août, entre deux missions à Alger et au Maroc, Leclerc confie à ses subordonnés : “Pendant trois ans, dans notre coin, nous avons représenté la France au combat et tenu son épée. Aujourd’hui, l’armée française reprend la lutte, notre mission est terminée. Nous avons été le trait d’union. Il ne nous reste plus qu’à rentrer dans cette armée puisqu’elle est décidée à combattre. (…) Il convient toutefois de conserver intact l’esprit de la France Combattante car il a fait ses preuves et représente l’esprit de la France.”

Le 24 août 1943, la 2e DFL devient officiellement la 2e division blindée (2e DB), sur le modèle des brigades américaines, avec des Combat Command (groupements tactiques), formations interarmes adaptées aux conditions du combat. Leclerc souhaite faire de sa division un symbole de l’unité nationale, sous l’autorité du général de Gaulle, chef suprême et unique de la France Combattante. En septembre, la 2e DB est regroupée au camp de Temara (Maroc), où elle va parfaire son entraînement et compléter ses effectifs jusqu’en avril 1944. A partir du 10 avril, elle commence à quitter le Maroc pour l’Angleterre, où elle est affectée à la 3e armée américaine de Patton.

(Source : www.france-libre.net)

 

 

L’ARTISAN DE LA 2e DB

(Sources : Mémorial Maréchal Leclerc de hauteclocque, Musée Jean Moulin, Mairie de Paris)

 

Créée le 24 août 1943, la 2e DB (division blindée) est constituée d’hommes et de femmes venant d’horizons multiples, d’opinions politiques et religieuses diverses. Aux Français libres d’origine se joignent des spahis d’Egypte, des compagnies de chars reconstituées en Angleterre, des unités entières d’Afrique du Nord (12e régiment de chasseurs d’Afrique, 12e régiment de cuirassiers), une unité de fusiliers marins, deux groupes d’artillerie. Des volontaires sont venus de nombreux points du monde, des évadés de France par l’Espagne (près de 3 000), des Corses, des prisonniers de guerre évadés par la Russie, des Alsaciens-Lorrains, des hommes du Corps Franc d’Afrique, des républicains espagnols, des quakers, objecteurs de conscience qui intègrent le bataillon médical. Des femmes, venant des Etats-Unis avec leurs ambulances, forment le groupe Rochambeau, en souvenir de l’aide du général français lors de la guerre d’indépendance américaine, et des Marinettes, conductrices appartenant à la marine française. 3 600 soldats originaires d’Afrique noire, d’Afrique du Nord, du Moyen-Orient, illustrent l’importance de la contribution de l’Empire à la libération de la France. Fin avril 1944, la 2e DB (environ 15 000 hommes) est acheminée dans le sud de l’Angleterre où sont concentrées les troupes alliées (Américains, Anglais, Canadiens, Polonais, Belges, Néerlandais, Tchécoslovaques). Tous ces hommes se préparent à débarquer en France. Lors d’une prise d’armes, à Dalton Hall, le 3 juillet 1944, le général Koenig remet leurs drapeaux aux unités et Leclerc fait distribuer à chacun l’insigne de la 2e Division blindée.

 

 

 

 

Un mot sur la façon dont les unités se sont retrouvées
pour former la 2e Division blindée

 

Extrait de LA 2e DB – Général Leclerc – Combattants et Combats – EN FRANCE

 

 

Chargé par le général de Gaulle de rallier le Cameroun, le colonel Leclerc débarque à Douala en 1940 avec vingt-deux compagnons (quelques-uns comme le capitaine Quiliquini sont encore à la Division). Dans la nuit du 26 au 27 août, ils passent la barre en pirogue, doivent eux-mêmes entrer dans l’eau, et la première chose qu’ils cherchent à terre sont des vêtements secs.

A Douala se trouvent le commandant Dio, qui vient de Fort-Lamy avec un détachement du Régiment de tirailleurs sénégalais du Tchad. Épaulé par lui, le coup de force réussit. Leclerc prend le commandement militaire du territoire, qui est tout entier rallié le 29 août. Le i” septembre, le capitaine Dronne part pour la première liaison avec le Tchad, qui, lui, s’est rallié le 26 août.

Le général de Gaulle arrive à Douala le 8 octobre. Avec lui, outre la légion, qui ira ensuite en Abyssinie, débarquent les douze chars du futur JQI. Ces troupes participent aux opérations que les hésitations du gouverneur Masson rendent nécessaires au Gabon et qui se terminent par la prise de Libreville.

Le colonel Leclerc gagne alors le Tchad, où il prend à la fois le commandement militaire et celui du K.T.S.T. A côté de quelques fidèles du Cameroun qui l’ont suivi, comme Geoffroy, qui tombera en Lorraine, il trouve sur place les d’Ornano, les Guillebon, les Massu et tous les autres, qui sous son impulsion se mettent à la tâche. Ils amalgament des Camerounais, des unités prélevées sur l’Oubanghi, le Moyen-Congo, le Gabon, auxquels se mêlent des volontaires arrivés d’Angleterre et de Syrie.

Ils drainent toutes les ressources matérielles de l’Afrique, reçoivent de l’extérieur un appoint qui une fois débarqué nécessite un long et laborieux acheminement. Crépin, l’artilleur de la côte, jette les bases de ce qui deviendra le 3e Régiment d’Artillerie coloniale, puis toute l’Artillerie de la Division et Dio forme le Régiment de marche du Tchad, tous deux issus du R.T.S.T.

La colonne, qui s’est fait un embryon de génie et de services, combat et traverse le Sahara. Venue de Syrie, la colonne volante se fond à elle en Tripolitaine : elle formera alors le Ier Régiment de marche de Spahis Marocains et le joie Régiment de chars de combat.

Après la bataille de Tunisie, tous ces éléments se regroupent à Sabratha, en Tripolitaine. Ils forment alors la 2e Division Française Libre, dont le Génie vient de Beyrouth avec le commandant Gravier. Elle est bientôt transportée au Maroc pour y former la 2e Division blindée.
Pour cette croissance, qui va se faire entre une plage et une forêt, à Témara, au sud de Rabat, elle va voir arriver des camarades qui se sont battus en Tunisie: le Corps franc, qui avec P«/^ donnera au R.M.T. un troisième bataillon; le 12e Chasseurs, qui en se dédoublant fournit des cadres AU 12e Cuir.; deux régiments d’artillerie, le 64e et le 40e , à qui Crépin va communiquer sa foi et sa solide méthode. Toutes les autres unités et le matériel nouveau indispensables à cette puissante machine arrivent par paquets, les effectifs se complètent des jeunes Français évadés par l’Espagne.

Le colonel Bernard, qui de Brazzaville avait patiemment épaulé ces garçons fous vers le désert, apporte maintenant, comme chef d’état-major, à tant de gens disparates une infatigable et bienveillante intelligence. En avril 1944, au moment d’embarquer pour l’Angleterre , la Division est rejointe par le Régiment blindé de Fusiliers Marins. Le long voyage en convoi à toucher les Acores, puis deux mois et demi dans la magnifique hospitalité anglaise achèvent de mûrir et de souder tous ces hommes : par-dessus les figures de chaque unité, qui n’en restent pas moins bien vives et bien personnelles, la Division, la «• D.B. », prend sa figure propre. Elle est faite, derrière son chef, de la liberté d’esprit qui donne à chacun le sentiment d’avoir accepté une place — et le désir de tenir exactement cette place — au service d’une très grande cause.

R. P.

 

 

 

 

NAISSANCE DE LA 2E DB

 

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Le creuset - TÉMARA

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7 ANS AVEC LECLERC

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